Vladivostok, l’exposition
Au dos de ce flyer est annoncé un vernissage de l’expo Vladivostok au Café Bretelles ce dimanche 11 novembre 2018. Autant le dire tout de suite, je n’aurai pas reçu les impressions. Ou alors je n’aurai qu’une partie des cadres. Ou bien je n’aurai pas eu le temps de préparer les cadres. Bref, ce qui se passera dimanche, ce sera vraisemblablement du vent et des moulinets… un peu à l’image des agitations des gens-que-vous-savez. Afin de parachever la réussite de ce vernissage qui n’est pas pour les losers, sachez qu’il n’y aura ni vin blanc ni bretzels, ni… il n’y aura rien en fait.
Maintenant que l’essentiel est clarifié, passons au superflu :
J’ai passé un mois dans ce port du bord du monde, en mai 2018, pendant lequel je me suis promené sans but autre que de prendre des photos. Distrayantes, dans le meilleur des cas, banales, sinon.
Vladivostok est une sélection de photographies tirées de mon Journal photographique n° 2 et imprimées au format 20 cm x 30 cm. Le carnet imprimé sera également consultable au Café Bretelles jusqu’à la fin de l’expo.
ps/ Si vous venez au non-vernissage ce dimanche 11, et me dites le code « Madagascar, Constantinople », je vous offrirai un café, sans le savoir.
VLADIVOSTOK
Café Bretelles
57, rue de Zurich
67000 Strasbourg
Du dimanche 11 novembre d’une date indéterminée en novembre, au mardi 25 décembre 2018
Sténopé ?
Tous mes appareils photos étant en réparation, j’ai sorti ce sténopé moyen format Zero Image 612B de sa boîte. Je l’ai depuis un an, c’est la première fois que j’ai l’intention de m’en servir. Pas glorieux, velléitaire, voire.
Par hasard et par chance, il se trouve que je dispose de quelques pellicules 120 de Portra 160 qui n’attendent que de donner la pleine mesure de leur délicate émulsion. Je les ai dégottées chez SPIP, à Phalsbourg, à 50 centimes pièce. J’ai bien entendu acheté tout le stock restant, soit 5 bobines. Petite précision en passant, elles sont périmées depuis octobre 1989 — mais on ne va pas laisser ce détail oiseux interférer.
Je commence par sacrifier une pelloche vierge pour récupérer sa bobine vide. Dit vite, ça semble évident, mais il m’a fallu un certain temps de recherche sur le ouaibe pour comprendre que, contrairement à la façon de fonctionner d’un Leica M3, il n’y a pas de bobine à demeure, et on ne rembobine pas une pellicule exposée. On récupère simplement la bobine dévidée qui servira pour la prochaine pellicule. C’est tellement con et basique que personne ne prend jamais la peine de le mentionner.
La première journée d’essai est frustrante. L’obturateur a une tendance marquée à s’ouvrir accidentellement, et j’ai déjà deux photos de l’intérieur de mon sac. C’est nul. J’ai trouvé un sac en tissu pour envelopper le sténopé, on verra bien.
Prochain rendez-vous quand j’aurai développé ces quelques rouleaux.
Tahara Keiichi 1973-1983
« En d’autres termes, voir une photographie, c’est considérer comment un artiste a conçu son regard et non pas ce qu’il a regardé […]. »
Dans un premier temps, je n’ai été sensible qu’à la matière des photos de Tahara Keiichi, à leur grain, à leur tendance à aller vers une abstraction modérée et modelée.
Et puis, à regarder plus attentivement, je me suis rendu compte que l’étroitesse de son sujet d’intérêt — la vue par sa fenêtre dans un premier temps, puis l’intérieur de sa chambre mansardée par la suite — engendre un sentiment (esthétique) d’oppression étouffante. Quand on sait que ces photos ont été prises sur une période de dix ans, on est pris de vertige en pensant à sa persévérance obstinée.
Je comprendrais, si on me disait que cette idée donne envie de vomir ses tripes. Le résultat oscille esthétiquement entre le voluptueusement beau et le sèchement austère.
1973-1980 FENÊTRE
Façades, nuages, ombres, Les photos sont très contrastées, le grain très marqué. Le regard est obsessivement tourné vers l’extérieur, mais d’une position radicalement retranchée.
Il se replie à l’intérieur. L’espace de sa chambre, des détails plutôt, même : un coin de radiateur, le bas d’un rideau, un tissu argenté, des reflets d’ombre, des jeux de lumière…
Tahara Keiichi a-t-il passé 10 ans enfermé dans sa chambre ? Veut-il disparaître ? A-t-il le projet de se retirer de ses photos ? Traque-t-il l’expression de son ego et vise-t-il un lieu « dont la circonférence serait partout et le centre nulle part » ?
PUIS JE CHERCHE SUR INTERNET…
Et là, c’est la baffe.
Déjà, je découvre que Tahara est un artiste et photographe très connu, ou plutôt était, car il est mort le 6 juin 2017 (il est né en 1951 à Kyōto) et il a vécu près de 30 ans en France (de 1974 à 2004). Il se démarquait par son intérêt pour la lumière, et ça ressort particulièrement vivement de ses nombreuses installations en France et au Japon.
Curieusement, je lis que la série de Fenêtres montrée dans le livre était l’expression de son désir d’aller vers les autres. Il venait d’arriver en France, ne parlait pas la langue et c’était sa façon de commencer à « creuser son trou ». L’exact contraire de ce que j’avais projeté (un repli sur soi digne de certains passages de Vendredi ou les limbes du Pacifique, de Michel Tournier).
La légende des photos a une certaine importance finalement.
Pour plus d’information :
> le site de Tahara Keiichi
> Tahara Keiichi sur Wikipédia
> Tahara Keiichi sur YouTube
Early black and white
Saul Leiter a accompli un exploit, ici. Il a eu la chance d’obtenir un cliché — fugitif mais réel — du « Chat de Perry Street ». On ne sait pas si c’est « a cat » ou « the cat », d’ailleurs, mais ayant l’imaginaire galopant, il s’agit de ce félidé accompli dont la légende rejoindrait celle du Yéti ou de Big Foot ou du monstre du Loch Ness.
Le chat échappe au cadre.
Perry Street Cat
Saul Leiter / Early black and white (II. Extérieurs)
Marylin Monroe
Au mois de mars 1955, Peter Mangone, un fan de 14 ans, a eu la chance de rencontrer son idole, accompagnée de deux amis, à la sortie de l’Hôtel Gladstone. Elle l’a reconnu, il s’est joint à eux et l’a filmée avec la caméra 8mm qu’il avait avec lui.
Cette bobine de film s’est ensuite perdue pour refaire surface en 2002. S’en est suivie une exposition à New-York après un important travail de numérisation et de retouche, même si le film avait été très bien conservé.
Je n’ai pu m’empêcher de penser au film de Zapruder montrant l’assassinat de John Kennedy. Par les ressemblances : le film 8mm, la lien entre Kennedy et Monroe, deux documents filmés, transmis par la grâce du hasard… Par les dissemblances, qui les lient aussi : un moment historique et dramatique d’un côté ; une après-midi innocente, isolée des dures réalités de l’autre.
D’un point de vue plastique, esthétique, artistique… J’ai certes un faible pour ces images granuleuses aux couleurs délavées. Et puis, oui, le fait qu’il s’agisse de Marylin Monroe donne une valeur supplémentaire à cette sélection de clichés. J’ai toutefois envie d’ajouter deux choses. Le naturel avec lequel elle se laisse filmer par ce gamin qui a la moitié de son âge, d’une part. Et l’expressivité de son visage, la variété de ses expressions aussi. Tout ça donne une sacrée force à l’ensemble, sans compter que la vieille règle des trois unités est respectée : unité de temps, de lieu et d’action !
Fortiche.
Marylin Monroe NYC, 1955
Photos de Peter Mangone
éd. Danziger Gallery
MS-Optics Apoqualia 35 mm f/1,4
J’ai rêvé voici une dizaine de jours que j’allais perdre beaucoup d’argent.
Conformément à mes craintes les plus abominables, il s’agissait effectivement d’un rêve prémonitoire.
Ce que je n’avais pas prévu, c’est que j’allais échanger quelques (gros) chiffres de l’interface de gestion de mon compte bancaire contre un exemplaire du 35 mm à grande ouverture (f/1,4) de Sadayasu Miyazaki, un artisan de l’objectif photographique dont la réputation n’est plus à faire. Ça change la donne, ouf !
Cette optique est presque introuvable aujourd’hui, à part un coup de chance sur la baie… pour ceux qui aiment les jeux de hasard. Hé bien, par un concours de circonstances fortuites, il se trouve que Taos photographie, le distributeur français de MS-Optics, en avait quelques unes disponibles, et sue par le plus grand des hasards je suis tombé dessus. Chance ou destin ?
Mmh…
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Pour un essai de cet objectif : le site de Fae photographie
Retour vers le Strasbourg
Un périple de cinq mois sur les terrasses de café du grand Est (aka Japon, Corée du Sud et Est de la Russie) s’est achevé le 21 juin : je suis de retour à Strasbourg. Curieusement, une trentaine de minutes m’auront suffi pour dissiper la sensation d’étrangeté et reprendre mes habitudes avec une facilité déconcertante. Bon.
J’ai amené à Labo 1000 à Schiltigheim quatre pellicules qui me restaient de Séoul et Vladivostok. Ce sont des pellicules dont j’ai « poussé » la sensibilité de 1 ou 2 diaphs. Je ne le savais pas, mais c’est une manipulation qu’il ne faut pas faire avec des négatifs couleurs, uniquement le noir & blanc ou les diapos. C’est une question de chimie du développement, etc.
Bonne nouvelle : j’ai finalement compris comment utiliser mon nouveau scan. J’ai commencé à numériser mes pellicules de Venise de novembre 2017 et j’ai une petite idée quant au livre que je vais en tirer. Le terme « livre » n’est d’ailleurs pas vraiment approprié, mais j’en dévoilerai plus ultérieurement.
Haiku Coffee Roasters
Tenu par Taniguchi et Kali, un couple nippo-hawaïen, le Haiku Coffee Roasters est mon café préféré à Osaka. C’est simple, le temps de mon séjour c’est devenu mon lieu de travail, mon atelier. J’y ai dégusté un Éthiopie Yurgacheffe Kochere (lavé) notamment, qui est un des meilleurs cafés que j’ai bu au Japon. Histoire d’en remettre une couche, l’endroit était à peine à 3 minutes à pied de ma guest house.
Yoshi et sa copine Mayu se sont pointés un jour avec leur appareil, et ça a un peu dérapé en session photo dans le café.