Le monde actuel, dont l’illisibilité donne le vertige, pourrait se trouver dans le processus lent de sécréter un embranchement évolutif à l’humanité.
D’une part la confusion hétéroclite d’êtres humains tels qu’on les a connus depuis longtemps et par ailleurs un réseau d’êtres connectés en permanence à un internet de nano-puces en tous genres, capteur de pression sanguine, d’humeur, de sujets de préoccupation, de relations humaines, de santé, etc. Par le fait même de cette connexion permanente et absolue, ces êtres soumis à un éclairage brutal de leur être profond, ne trouvant plus nulle part l’abri de l’ombre, en subiraient pour conséquence le siphonnage de leur substance spirituelle. Sous perfusion contrôlée par nano-capteur connecté d’un cocktail chimique libérant la dose quotidienne de « soma », les il.elle.s rempliraient leur fonction sociale, libres de tout doute sur la bienveillance de leur gouvernance technique. Par la suite, ces unités biologiques agiraient avec la cohérence de la techno-ruche, sans se perdre en ces questions futiles qui font l’essence de la vie d’un être humain : peur, courage, amour, haine, angoisse, lâcheté, lutte, capitulation, souffrance, plaisir, etc. Les bio-unités de la techno-ruche seraient semblables à des pantins désorientés dès lors qu’ils perdraient leur lien technologique avec le rassurant réseau. Le réseau leur répéterait inlassablement au creux de l’oreille que faire, que penser — à la manière des médias d’aujourd’hui, dont les mensonges sont écoutés et suivis, par le simple effet de la répétition. Un célèbre ministre de la Propagande du milieu du XXe siècle goûtait grandement cet effet de répétition par sa capacité à faire passer un mensonge pour une vérité.
Pour la techno-matrice, quel sens aurait la perte d’une de ses celluloïdes (cellules humanoïdes) la composant ? Comparable à celui d’un ongle ou d’un cheveu pour nous. Au pire, un orteil.